J'ai rencontré pour la première fois Jean Daviot il y a une dizaine d'années, je venais faire un reportage pour une revue américaine sur les nouveaux artistes Européens. A 22 ans, il animait avec François Pluchart au journal l'Art Vivant une équipe où passait tout ce qui comptait dans la jeune génération comme artistes, critiques, écrivains... Je fus surpris par son travail très engagé sur la représentation du corps : une uvre austère en décalage avec l'époque très expressive-extravertie-hédoniste. Il me présenta Michel Journiac, le fondateur de l'art corporel, avec lequel il travaillait sur plusieurs projets et me fit découvrir un courrant que j'ignorais de l'art en France. Un groupe était entré en résistance à la fois contre un marché de l'art livré à une spéculation effrénée et contre un académisme institutionnel. J'appréciais de rencontrer des artistes, proches d'une certaine idée que je me faisait de l'histoire intellectuelle de ce pays, celui de Foucault, Barthes, et qui constituaient une relève.
Lors de mon dernier passage à Paris dans l'atelier de Jean Daviot j'ai vu une série de portraits de gens qui passent lui rendre visite. Il m'explique qu'il pose les têtes et les mains de ses visiteurs sur son photocopieur et prend ainsi leur empreinte. La photographie fixe la lumière, le procédé que Jean Daviot utilise fixe l'ombre. Paradoxe ? les neurobiologistes cherchent l'âme dans l'influx nerveux, Jean Daviot la trouve dans la part de cette ombre, béance de la trame des apparences comme aurait dit Lacan.